L’argent et le monde
Finances 2024 : Wall Street fait la fête, les autres font la tête
Le monde de la finance avait de nombreuses raisons de se réjouir en 2024. Le monde ordinaire? Pas tant que ça.
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Au même moment l’an dernier, les marchés se portaient plutôt bien. Grâce à une montée des actions qui a débuté vers octobre 2023, le S&P 500 était en voie de terminer 2023 avec une hausse de 24 %, et le TSX, de 8 %. Les entreprises avaient dépassé les attentes, l’inflation se calmait et l’économie, dans l’ensemble, se portait plutôt bien. Mais l’inquiétude était tout de même au rendez-vous : tensions géopolitiques croissantes, éventualité d’une nouvelle envolée de l’inflation, possibilité d’une récession (le cabinet montréalais BCA évaluait les chances à 25 %). La crise pouvait éclater à tout moment. On le sentait.
Et devinez quoi? On avait raison. Des guerres dévastatrices en Ukraine et au Moyen-Orient se sont prolongées et étendues. Donald Trump a failli être assassiné. Joe Biden s’est retiré en pleine course à la présidence des États-Unis. La Chine a multiplié les exercices militaires autour de Taïwan. Les gouvernements français et allemand sont tombés. Et c’est sans parler de nouvelles importantes chez nous, comme la grève de Postes Canada, les feux de forêt à Jasper, la réforme de la politique d’immigration ou la hausse du taux de chômage.
Pourtant, rien de tout ça n’a fait broncher les marchés! Au moment d’écrire ces lignes, les actions mondiales avaient progressé de 22 % depuis janvier 2024, tandis que le Nasdaq était en hausse de plus de 30 %. Autrement dit, toutes les prévisions pessimistes pour 2024 – et elles étaient nombreuses – étaient largement exagérées, voire carrément fausses. Ce qui rappelle un vieux principe d’investissement : n’essayez pas d’anticiper le marché en vous basant sur des prévisions. Voici trois autres grandes leçons à tirer de 2024.
[1] Rien n’excite Wall Street comme une baisse de taux
Le S&P 500 a grimpé de 28,5 % depuis le début de l’année : l’une de ses meilleures performances annuelles du siècle, à 20 points de plus que plusieurs prédictions. Le TSX, quant à lui, a progressé de 24 % sur l’année, soit sa deuxième meilleure performance annuelle au cours des 20 dernières années, un bilan remarquablement fort pour un indice faible en technologie. Avec les risques et les troubles à l’échelle mondiale, comment est-ce possible? Voilà : les entreprises ont engrangé BIEN PLUS d’argent que ce à quoi on s’attendait. C’est presque scandaleux : selon le trimestre, entre 75 % et 80 % des entreprises du S&P 500 ont dépassé les estimations, augmentant leurs profits d’environ 9,4 % en 2023. (Il suffit de consulter ce graphique complètement fou (en anglais seulement) pour constater la rentabilité des entreprises américaines.) De nombreux symboles canadiens ont également enregistré des bénéfices bien supérieurs aux prévisions.
Alors, comment les entreprises ont-elles fait autant d’argent? On en revient à l’inflation : l’important ralentissement de la hausse des prix à la consommation cette année, de l’épicerie aux gadgets, a donné aux banques centrales la marge de manœuvre nécessaire pour enfin baisser les taux d’intérêt de manière considérable. Ce qui a encouragé l’emprunt et les dépenses. Ce qui a profité aux entreprises.
[2] Main Street se préoccupe surtout des prix
Alors que la fête boursière bat son plein, Main Street (le surnom de monsieur et madame Tout-le-Monde dans la biz) n’a pas reçu l’invitation… et en est plutôt fâchée. Le ralentissement de l’inflation, bien que bénéfique pour les marchés, ne fait pas baisser les prix (il s’agirait alors de déflation) ; il signifie simplement que les prix augmentent plus lentement. Donc une visite à l’épicerie peut encore provoquer un choc nerveux. Il n’est donc pas étonnant qu’un grand nombre de personnes – en particulier celles qui n’ont pas de placements ou de maison dont la valeur a augmenté au cours des dernières années inflationnistes – aient l’impression de se trouver dans une situation économique de plus en plus précaire. Et qui peut les blâmer? Après tout, une forte croissance trimestrielle du PIB, ça ne se mange pas. Pour ajouter aux frustrations, ici au Canada, le taux de chômage modérément bas (mais en hausse) de 6,8 % a masqué le fait que de nombreux emplois disponibles sont des postes à faible revenu destinés aux travailleurs étrangers temporaires ou aux nouveaux arrivants. Et puis, bien sûr, il y a la crise du logement, qui ne sera probablement pas réglée de sitôt.
Mais c’est dans les bureaux de vote que le mécontentement populaire s’est le plus manifesté. Cette année, tous les partis en place soumis au vote dans une démocratie développée – peu importe leur couleur – ont été punis. Le Royaume-Uni a chassé les Tories conservateurs, tandis que les États-Unis ont boudé les démocrates. Le Canada semble prêt à faire la même chose : selon un récent sondage, seulement 25 % des Canadien·nes pensent que le pays va dans la bonne direction, et l’opposition conservatrice détient une avance de 19 % à l’approche de la saison électorale. Le fait est que les gens n’étaient pas, et ne sont toujours pas, habitués à des prix aussi élevés. C’est une chose que les dirigeant·es canadien·nes pourraient envisager au moment d’élaborer des politiques relatives au logement, à l’alimentation et à d’autres domaines qui touchent le portefeuille de la population. C’est là que ça compte vraiment.
[3] La suite du crypto-feuilleton
On ne ferait pas notre job si on omettait de mentionner un autre des héritiers de la ferveur anti-establishment qui a balayé le monde : le retour en force des cryptomonnaies après un tour dans les bas-fonds en 2022. Le bitcoin a progressé de 141 % cette année! Pourquoi? Surtout parce que les crypto-adeptes soupçonnent que Donald Trump va contribuer à améliorer la légitimité des cryptos, et ce, malgré leur instabilité et leurs côtés risqués. Mais le plus remarquable à propos de la crypto-reprise de 2024, c’est que, contrairement à 2021, il y a eu très peu de remises en question quant aux possibles utilisations de la crypto. Pourtant, peu de gens l’utilisent réellement au quotidien; la crypto-communauté la voit plutôt comme un « nouvel or », soit un actif spéculatif principalement utilisé pour placer son argent à l’abri des catastrophes financières (un crypto-abri?). Le directeur de la Réserve fédérale lui-même a récemment renforcé cette idée en comparant Bitcoin à de l’or numérique.
2025, l’an où les tarifs douaniers secoueront le commerce mondial?
Les prédictions sur 2024 en sont la preuve : tenter de prévoir le futur est un jeu perdu d’avance. Même les pros de l’investissement y échouent lamentablement. Cela dit, bon nombre de stratèges et gestionnaires de fonds de Wall Street croient que le S&P 500 gagnera de 8 % à 10 % en 2025, soit une performance assez standard, historiquement. Quant au TSX, les attentes s’établissent à 4,5 %.
Une grande inconnue brouille toutefois les boules de cristal : les tarifs douaniers (encore eux). Trump menace d’imposer des droits de 25 % sur nos exportations à notre plus grand partenaire commercial. Malgré des menaces semblables durant son précédent mandat, Trump ne les avait augmentés que sur l’acier et l’aluminium et quelques autres produits – une chance que n’a pas eue la Chine (voir le graphique). La Banque TD estime que, même avec des tarifs de 10 %, les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis resteraient assez stables, et que le PIB du Canada baisserait de 2,4 % en deux ans. Mais elle soupçonne aussi Trump de bluffer – une idée partagée sur les marchés des paris. Espérons que les prédictions seront plus fiables qu’en 2024.
Ben Mathis-Lilley is a senior writer for Slate.com and the author ofThe Hot Seat: A Year of Outrage, Pride, and Occasional Games of College Football. He's also written for BuzzFeed and New York magazine.
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